Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

05/06/2014

4-5 juin 1944 : Français et Américains libèrent Rome

Qui s'en souvient aujourd'hui ? Qui connaît et enseigne encore les exploits de l'armée française d'Italie ? Eric Levavasseur nous rappelle cette page d'histoire :

Rome-Colisee-defile2.jpg

 


Les 4 et 5 juin 1944, l'armée française et américaines ont libéré Rome, la Ville Eternelle. Qui s'en souvient ? Qui connait les exploits de cette armée française ?

Entièrement ré équipée par les Américains, elle a débarqué en Italie en novembre 1943. Auparavant, pendant la campagne de Tunisie (novembre 42 -mai 43) c'est elle qui a sauvé la situation des Alliés lors de la bataille de Medjez el Bab. Avec un armement complètement dépassé, les Français ont combattu dans les montagnes, sur les dorsales tunisiennes, en plein hiver, sous les bombardements incessants de l'aviation allemande qui a conservé la maîtrise de l'air jusqu'à la mi-mars 1943.

En mai 43, Tunis est libéré ; les Anglo-Américains et un contingent français débarquent en Sicile.

L'armée française, qui a été au plus fort de combats de Tunisie, se rééquipe totalement, puis, seule, traverse de nuit la Méditerranée jusqu'à la Corse où elle débarque le 8 septembre pour affronter deux divisions allemandes, dont une SS, dans une bataille très difficile où les Corses montrent beaucoup de courage. Ainsi la première ville française libérée n'est pas Sainte-Mère-Eglise le 6 juin 44, mais Ajaccio, par l'armée française.

Les Français offrent ainsi aux Alliés les services de cet immense porte-avion, totalement insubmersible, que les Américains surnomment le USS Corsica.

 Puis, en novembre 43, l'armée française rejoint les Alliés en Italie. Depuis janvier 1944, Ceux-ci sont bloqués devant le Mont Cassin où les parachutistes allemands, en position dominante, déjouent toutes les attaques.

Après avoir été bloqués pendant trois mois, les Alliés adoptent le plan français de débordement : au lieu d'attaquer frontalement, on attaquera sur le flanc, par une montagne réputée imprenable, ce qui obligera les Allemands pour ne pas être encerclés à abandonner leur position. La manœuvre réussit et les Polonais peuvent prendre le mont d'assaut. La route de Rome est ouverte.

A Rome la situation est terrible. Le roi d'Italie a finalement fait arrêter Mussolini et fait entrer l'Italie en guerre aux côtés des Alliés : mais à la nouvelle de l'entrée des Allemands dans son pays, il s'est enfui de nuit dans le Mezzogiorno, abandonnant les Italiens et laissant les troupes sans ordres. 

Le pape Pie XII apparaît comme la seule autorité légitime. Il s'efforce de faire déclarer la ville ouverte pour éviter combats et bombardements. On le voit dans les ruines visitant les sinistrés. Des centaines d'Italiens sont sauvagement massacrés. Une tension épouvantable règne. L'Eglise se montre extrêmement active pour cacher fugitifs et pilotes alliés, Quatre mille juifs sont cachés dans les couvents et institutions religieuses, des prêtres sont fusillés. A Saint-Jean de Latran, le pape cache les principaux dirigeants des partis d'avant 1922 qui ont formé le Comité de libération nationale.

Le général allemand Kesselring, par l'entremise du Vatican, cherche à obtenir l'accord des Alliés  pour maintenir la ville hors de la zone des combats. Ne l'obtenant pas, il décide d'évacuer. L'armée allemande se retire donc de Rome tout en menant d'incessants combats de retardement et en piégeant les routes.

Le 4 juin, les Français entrent dans Rome en passant par Tivoli.

Au palais Farnèse, le soldat Paul Poggionovo hisse le drapeau français sur l'ambassade de France (photo).

sans-titre.png

   

Une prise d'armes est organisée. Juin, en raison d'un vieille blessure, salue du bras gauche. Le général américain Clarke qui a retiré de la campagne une vive admiration pour l'armée française, donne rendez-vous au général Juin pour "visiter Rome", lui cède la place dans sa jeep, et les voilà partis. Applaudis, ils visitent la Ville Eternelle, se rendent au palais du Quirinal où Clarke s'efface devant Juin en lui disant : « après vous, car sans vous nous ne serions pas là ! » « Nous non plus : sans votre aide, nous ne serions pas là", répond Juin.

Puis vient la visite au pape. « Votre sainteté, je crains de vous avoir un peu dérangé avec le bruit de mes tanks. Je vous prie de m’en excuser », dit Clarke. « Général, à chaque fois que vous viendrez libérer Rome, vous pourrez faire autant de bruit qu’il vous plaira », répond Pie XII.

Members_of_the_Royal_22e_Regiment_in_audience_with_Pope_Pius_XII.jpg

 

Le 6 juin un grand défilé se tient depuis le Colisée jusqu'à la Piazza Venezia (photo ci-dessus).

Il restera aux Français à libérer l'Ile d'Elbe dans une opération folle, à libérer Sienne "sans casser une statue", à terminer la bataille de Falaise, à débarquer en Provence, remonter le Rhône, libérer Paris, gagner la bataille d'Alsace, franchir le Rhin les premiers, et planter les premiers le drapeau tricolore de la 2ème DB sur Berchtesgaden.

Mais le 6 juin, pendant que l'armée défile à Rome, à 2000 kilomètres de là, les Alliés ont débarqué en Normandie : dans la nuit du 5 au 6, des parachutistes français ont déjà touché le sol français dans le cadre des opérations Samwest Dingson et Cooney, afin d'empêcher les cent mille hommes de la Wehrmacht stationnés en Bretagne de rejoindre le front normand, en sabotant tout (carte).

800px-Bretagnesas.jpg

 

Mission parfaitement réussie :cent mille hommes bloqués au prix de 77 paras et 116 résistants tués.  Mais cela, c'est une autre histoire.

 

                                                                                              E.L.

 

23:15 Publié dans Histoire | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : histoire, 1944

Commentaires

LE FANION DE SIENNE

> Merci de ce rappel ! J'en profite pour recommander chaleureusement les deux livres de Jean-Christophe Notin sur la campagne d'Italie puis sur la campagne d'Allemagne : "Les victoires oubliées de la France" et "Les vaincus seront les vainqueurs". A Sienne, le corps expéditionnaire français reçut de la ville un fanion brodé qui disait : "Pas un obus français n'est tombé sur Sienne". J'y pense souvent en ces temps de drones...
______

Écrit par : Christian / | 06/06/2014

MERCI À E.L.

> Qui s'en souvient, en effet? Qui même le sait? Mille fois merci à E. L. pour ce rappel. N'en déplaise à une certaine vulgate libéralo-gauchiste de 39 à 45 les Français n'ont pas tous été des trouillards ou des collabos !
______

Écrit par : grzyb / | 06/06/2014

POGGIONOVO

> Paul Poggionovo pas Poggionato (erreur de ma part)
Un petit souvenir aussi pour Emile Bouëtard qui est mort il y a 70 ans, dans la nuit du 5 au 6 juin.
Ce parachutiste français est le premier mort de l'opération Overlord.
______

Écrit par : E Levavasseur / | 06/06/2014

SUR LE TERRAIN

> A noter que les paras allemands ne se sont installés sur la montagne et le monastère du Mont Cassin (le monastère bénédictin) qu'après le bombardement et la destruction du monastère par les américains. Les Allemands avaient bien respecté la neutralité du lieu, contrairement aux Américains qui justifiaient la qualité des pointages de l'artillerie ennemie par la présence d'observateurs dans ce lieu surplombant.
Mais les Allemands, qui avaient déjà 6 ans d'expérience militaire, contre à peine 2 pour les Américains, maitrisaient très bien cette "compétence militaire" (ce qui masquait leur faiblesse de moyens). Les Américains disposant eux de l'abondance d'une production industrielle intarissable (les villes de Normandie, du Nord et de l'Allemagne en savent quelque chose). "Les années de guerre comptent double (au niveau de l'expérience)", dixit un officier allemand sur le front russe.
D'où peut être la "valeur des troupes françaises", bien mieux expérimentées que les "jeunots américains".
Voir le récit de Frère Gereon Goldmann "Un franciscain chez les SS", qui a vécu in-situ la bataille du Mont Cassin (et bien d'autres).
Cdt,
______

Écrit par : Bergil / | 06/06/2014

@ Eric Levavasseur

> Après longue coupure d'internet (3 jours) je découvre ce beau rappel. Merci.

Si vous permettez, une évocation du plan Juin: il voulait passer les Alpes et tomber sur l'Autriche. Cela aurait réduit les destructions en France et diminué la place des Américains... et fut refusé.
______

Écrit par : Pierre Huet / | 07/06/2014

BRAVO ERIC

> Bravo Éric pour ce récit passionnant ! Et stp si tu as un peu de temps, continue à écrire !
J'ignorais totalement cet épisode de la guerre, alors merci...
______

Écrit par : Guillaume de Prémare / | 08/06/2014

> il y a 70 ans encore

9 juin : massacres de Tulle et d'Argenton sur creuse

10 juin : Oradour sur Glane
______

Écrit par : E Levavasseur / | 10/06/2014

Les commentaires sont fermés.